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LA CRISE DES PRISONS : UNE RESPONSABILITÉ PARTAGÉE POUR PROTÉGER LES DROITS DES DÉTENUS ET PRÉSERVER LEUR DIGNITÉ

Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a rendu public son rapport sur la situation dans les prisons et des prisonniers qui s’intitule ‘la crise des prisons, une responsabilité partagée : 100 recommandations pour protéger les droits des détenu(e)s’.
Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a rendu public son rapport sur la situation dans les prisons et des prisonniers qui s’intitule ‘la crise des prisons, une responsabilité partagée : 100 recommandations pour protéger les droits des détenu(e)s’.
 
Présenté par Mme Jamila Sayouri, membre du CNDH et coordinatrice du groupe de travail sur le monitoring et la protection des droits de l’Homme lors d’une conférence de presse organisée le mardi 31 octobre 2012 à son siège à Rabat, ce rapport thématique met en exergue le contexte, la méthodologie ainsi que les principales conclusions et recommandations émises par le Conseil.
 
La crise des prisons
 
Ce rapport thématique est le deuxième du genre à être publié par le CNDH dans le cadre de l’exercice de ses prorogatives prévues par le Dahir portant sa création, après le rapport thématique sur la santé mentale et les droits de l’Homme. Il résume la crise des prisons dans la prolifération de la maltraitance, le surpeuplement, la discrimination fondée sur le genre, le sexe et la couleur, la non application de la loi, des procédures et des dispositions pertinentes ainsi que les dysfonctionnements législatifs.
 
Ainsi, le rapport relève la persistance d’un certain nombre d’exactions commises à l’encontre des détenus dont les traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’existence de lieux de torture au sein de certains établissements pénitentiaires, le recours excessif au pouvoir discrétionnaire dans l’interprétation des infractions, des abus dans le recours au transfert administratif comme mesure disciplinaire à l’encontre des détenus et l’absence de procédure de contrôle et d’inspection à même de mettre un terme aux différentes manifestations de corruption qui caractérisent certains établissements à des degrés différents. S’ajoute à cela la prolifération du phénomène du surpeuplement qui constitue l’une des principales causes de bon nombre de violations des droits de l’Homme et qui porte atteinte à la qualité des prestations fournies et aux droits fondamentaux des détenus, et dont le recours excessif à la détention préventive constitue l’un de ses principales causes.
 
Les dysfonctionnements qui gangrènent les établissements pénitentiaires se manifestent également par les souffrances des catégories vulnérables dont les femmes, les personnes en situation de handicap (mental ou physique), les étrangers et les toxicomanes. Ces catégories pâtissent, plus que d’autres, des traitements cruels, inhumains et dégradants, et sont privés de leurs droits en raison de la stigmatisation et la discrimination basée sur le sexe et la couleur, et ce, en l’absence des garanties juridiques nécessaires et d’une prise en charge adéquate (accessibilités, traitements etc.).
 
 
Le Conseil relève également la non mise en œuvre des dispositions du code de procédure pénale relatives à la justice des mineurs (les articles 458 à 504), les dysfonctionnements relatives à la procédure de grâce et sa non application pour les détenus ayant purgé les 2/3 de leur peine, les personnes âgées, et pour ceux atteints de maladies chroniques et mentales. S’ajoutent à cela l’absence de l’approche genre dans la législation pénale actuelle et du système des peines alternatives, en particulier concernant les délits dont les peines ne dépassent pas cinq ans. Le rapport relate aussi des lacunes et un vide juridique au niveau des textes relatifs au fonctionnement et à l’organisation des établissements pénitentiaires, une ambiguïté dans la détermination des responsabilités dans la mise en œuvre de certaines dispositions, ainsi que le caractère limité des activités autorisées aux associations qui se limitent aux occasions et sont conditionnées par une autorisation préalable du Délégué Général de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion.
 
Une responsabilité partagée
 
Les responsables du CNDH (président et secrétaire général) ont été unanimes pour considérer que la crise des prisons est une responsabilité partagée dont la résolution exige la synergie des efforts de tous les intervenants. Une position clairement réitérée par le rapport du Conseil qui a adressé ses recommandations à la Délégation Générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion, aux Ministères de la justice et des libertés et de l’Intérieur et au parlement, outre ses recommandations destinées aux organisations de la société civile, la Fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus, la Haute instance du dialogue national chargée de la réforme de la Justice, les autorités judiciaires, le gouvernement et le Conseil national des droits de l’Homme lui-même ( à travers l’organisation de sessions de formation au profit du personnel des établissements pénitentiaires dans le domaine des droits de l’Homme).
 
100 recommandations pour la protection des droits des détenus
 
Partant du fait que les détenus sont des personnes privées de leur liberté, mais qui conservent leurs droits humains fondamentaux en vertu des principes fondamentaux relatifs au traitement des détenus adoptés par l’Assemblée générale des Nations unies en décembre 1990, et en vue de prendre les dispositions nécessaires au redressement de la situation dans les prisons, le rapport du CNDH a présenté 100 recommandations adressées aux différents intervenants concernés par ce secteur qui visent à garantir et à protéger les droits de cette catégorie de citoyens. Parmi les recommandations formulées dans le rapport : le respect des droits de l’Homme dans le traitement des détenus, la non discrimination entre eux sur quelques motifs que ce soit, le non recours à la violence ou à tous traitements cruels, inhumains ou dégradants à leur encontre, la dotation des établissements pénitentiaires des ressources conformément au standards internationaux et le renforcement de leur capacité en matière de formation et d’éducation aux droits de l’Homme, la mise en place en place des accessibilités pour les personnes en situation de handicap, le réaménagement et la restauration des prisons les plus anciennes et la fermeture de certains établissements pénitentiaires (en particulier celui de Aïn Kadouss).
 
 
Le rapport recommande également la rationalisation de la détention préventive et la mise en œuvre du contrôle judiciaire qui doit devenir obligatoire, le remplacement des jugements à des peines de courte durée par des peines en sursis ou des amendes en attendant l’adoption des peines alternatives. Il préconise également l’accélération des procès des personnes en détention préventive et la mise en œuvre de la liberté conditionnelle.
 
Le Conseil prône aussi dans son rapport le respect des dispositions de la justice des mineurs, l’application instantanée et immédiate des décisions de modification de la mesure par les juges et les conseillers chargés des mineurs, ainsi que la formation de juges spécialisés dans la justice des mineurs.
 
Considérant que la Délégation Générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion et le Ministère de la Justice et des Libertés ne sont pas les seuls concernés par la crise des prisons, le CNDH recommande la mise en œuvre du contrôle législatif par le parlement notamment au niveau de la législation, l’exploration, l’investigation et l’interpellation, ainsi que la mise en œuvre du contrôle des commissions provinciales en vue d’améliorer la situation dans les prisons et des prisonniers.
 
Le Conseil qui appelle également à l’élargissement des domaines d’intervention de la société civile et au renforcement du rôle de la Fondation Mohammed VI pour la réinsertion des détenus en matière d’accompagnement post-carcéral des détenus, attire l’attention sur l’importance de la création des centres de protection de l’enfance et de la protection des enfants nés au sein des établissements pénitentiaires. Le rapport du CNDH met en exergue aussi l’importance d’une révision globale de la loi relative à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires de manière à harmoniser ses dispositions avec les normes internationales des droits de l’Homme, et en particulier l’ensemble des règles minima pour le traitement des détenus ainsi que les obligations du personnel chargé d’appliquer la loi.
 
Le rapport recommande, en dernier lieu, le lancement d’un dialogue national sur la situation dans les prisons qui réunit tous les acteurs concernés par la problématique des prisons, et la mise en œuvre des recommandations de l’Instance Equité et Réconciliation concernant la ratification du Deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à abolir la peine de mort, et l’accélération du processus de ratification du protocole facultatif à la convention internationale contre la torture, et par conséquent la création d’un mécanisme indépendant pour la prévention de la torture, conformément audit protocole.
 
Répondant aux interrogations des journalistes, M. Driss El Yazami, président du CNDH a qualifié de graves les violations commises au sein des prisons bien qu’étant individuelle et non systématique, considérant que la crise des prisons est une crise structurelle et la responsabilité y est partagée et nécessite une intervention commune en vue pallier à cette situation. Pour sa part, M. Mohamed Essabbar, secrétaire général du CNDH, pour qui la problématique des prisons constitue une crise réelle, a mis l’accent sur la nécessité de revoir la politique punitive dont le taux élevé de récidive prouve son échec, laquelle doit être fondée, selon sur la dissuasion, le redressement et l’insertion.
 
Il convient de noter que pour l’élaboration de son rapport, le Conseil a adopté une approche participative dans le déroulement des visites effectuées entre le 31 janvier et le 19 juin2012, en total respect des techniques de visite des prisons universellement reconnus, et selon une approche des droits de l’Homme qui prend appui sur les différentes conventions internationales et les textes juridiques et organiques nationaux relatifs à la situation dans les prisons et des prisonniers.
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